Mercredi, le gouvernement français a publié un nouvel appel a
l'arrêt immédiat de la colonisation israélienne dans les Territoires
palestiniens occupés en 1967. Cette déclaration correspond à une
réalité indéniable, et je voudrais profiter de l'occasion pour avancer
une solution positive sur cette question.
A maintes reprises, le président Nicolas Sarkozy a appelé au gel de
la colonisation israélienne dans les territoires occupés palestiniens.
A l'occasion de son discours prononçé devant la Knesset le 23 juin 2008,
le président de la République française a ainsi déclaré qu'« il “ne
peut y avoir de paix sans l'arrêt de la colonisation”. L'arrêt de la
colonisation israélienne en territoire palestinien constitue un premier
pas vers la paix.
Après près de 42 années de colonisation des territoires occupés,
alors que la viabilité du futur Etat palestinien est aujourd'hui en
péril, les condamnations officielles et les résolutions des Nations
unies demeurent malheureusement sans effet. Avec près de 500 000 colons
résidant aujourd'hui en Cisjordanie, dont 185 000 au sein et aux
environs de Jérusalem Est, la situation est devenue insoutenable.
Il y a bien longtemps que les mots ne suffisent plus. Pour
sauvegarder la perspective d'une solution de paix basée sur deux Etats,
il serait important que la France comme l'Union Européenne se
saisissent de ce problème crucial et relèvent le défi. L'urgence
justifierait une action sur trois fronts.
Des entreprises françaises construisent le tramway de Jerusaleme-est occupée
Il convient d'abord de constater que l'explosion de la colonisation
doit beaucoup aux avantages économiques octroyés aux colons. Selon un
sondage de La Paix Maintenant,
la grande organisation pacifiste israélienne, 77% des colons (en
Cisjordanie, Jérusalem non compris) ont choisi d'habiter en Cisjordanie
pour des raisons liées au “mode de vie” proposé. Le plus souvent, ces
colons s'installent en territoire palestinien parce que l'Etat d'Israël
leur offre des logements de qualité à bas prix agrémentés d'incitations
financières.
La construction d'infrastructures et la mise à disposition de
services à l'usage exclusif des colons entravent le fonctionnement
normal des villes et villages palestiniens. Ce sont l'existence de ces
colonies qui justifient largement les restrictions à la libre
circulation des Palestiniens imposées par Israël, et matérialisées par
les checks points et le Mur de Séparation.
A force de destructions de maisons et de confiscations de terres,
mes compatriotes viennent grossir chaque jour les agglomérations
palestiniennes existantes, et déjà surpeuplées. Enfin, l'extension des
colonies et la main mise des autorités israéliennes sur les ressources
naturelles palestiniennes limitent les sources de revenu à la
disposition des Palestiniens. Elles privent des centaines de milliers
d'entre eux des moyens de mener une vie décente.
La responsabilité israélienne est centrale. On ne peut cependant
passer sous silence le comportement de nombreuses sociétés étrangères,
qui finalement contribue au développement démographique et économique
de ces colonies en Cisjordanie.
Notamment, certaines entreprises françaises, répondant à une commande israélienne, achèvent de construire un tramway à Jérusalem-Est occupé.
Cette ligne de tramway ne sert pas le bien-être des Palestiniens mais
vise à connecter les colonies israéliennes au centre de Jérusalem.
Cette construction atomise un peu plus le tissu socio-économique
palestinien tout en consolidant la mainmise d'Israël sur Jérusalem.
Sans doute est-il nécessaire de rappeler que le transfert d'une population étrangère sur une terre occupée est prohibé par la quatrième convention de Genève du 12 août 1949, dont le Conseil de sécurité des Nations unies a maintes fois réaffirmé la validité. La résolution 465 du 1er mars 1980, affirme notamment que :
“ Toutes les mesures prises par Israël pour modifier le
caractère physique, la composition démographique, la structure
institutionnelle ou le statut des territoires palestiniens (…) y
compris Jérusalem (…) n'ont aucune valeur en droit. ” Les Etats doivent
donc “ ne fournir à Israël aucune assistance qui serait utilisée
spécifiquement pour les colonies de peuplement ”.
Aussi, est-il devenu aujourd'hui indispensable que la France prenne
les mesures adéquates afin d'empêcher ses entreprises et ses nationaux
d'agir illégalement dans les territoires occupés palestiniens.
La France importe des produits des colonies
Second terrain qu'il convient de couvrir : mettre fin à
l'importation de biens produits dans les colonies. Au sein de l'UE, la
France figure parmi les premiers importateurs de produits israéliens.
Parmi ceux-ci, nombreux sont les produits qui proviennent en réalité de
colonies situées en Cisjordanie.
Ainsi, des sociétés israéliennes implantées dans les colonies
s'enrichissent injustement en exploitant la terre et l'eau illégalement
soustraites aux Palestiniens, ressources qui devraient normalement
permettre le développement économique palestinien.
L'UE et Israël disposent d'un arrangement qui prévoit que ces biens
ne bénéficient pas de l'accord de libre-échange qui les lie. Mais
comment peut-on accepter que ces biens, produits sur un territoire
usurpé en violation du droit international, puissent même continuer à
entrer sur le marché européen ?
L'UE doit exercer concètement son influence
L'UE jouit déjà d'une relation étroite avec Israël. Elle peut dès à
présent utiliser son influence auprès de son partenaire afin d'obtenir
qu'il se conforme à ses demandes répétées de geler la colonisation. Il
est grand temps d'adopter une nouvelle approche : Israël, comme
n'importe quel Etat agissant en violation du droit international, doit
comprendre que de tels agissements ont un coût.
Seules des mesures concrètes prises par les grandes puissances et
notamment l'Etat français et l'UE peuvent mettre fin au morcellement
continu des territoires qui torpille les dernières chances de paix
entre Israël et le peuple palestinien.
L'UE soutient ces territoires occupés à hauteur de 500 millions
d'euros par an. Tout comme il relève de sa responsabilité de vérifier
que cet argent sert directement la cause de la paix, il est de son
droit de s'assurer que cet investissement n'est pas sabordé par la
politique de “fait accompli” menée par Israël en territoire
palestinien.
Agir sur le front des colonies, après des décennies de condamnations
infructueuses, ce n'est pas favoriser un camp ou l'autre. Joindre les
actes à la parole c'est au contraire sauver les derniers espoirs de
paix sur la base de la cohabitation de deux Etats.
Photo : sur un chantier isarélien de construction à Jabal Abu
Ghneim dans les Territoires occupés le 5 juillet 2009 (Baz
Ratner/Reuters).