IntroductionLors de son combat contre la LRU,
la coordination étudiante de Poitiers a connu quelques lourds
problèmes de fonctionnement. Une partie importante d'acteurs
se sont lassés d'y participer, ressentant chaque réunion
comme le théâtre incessant et répétitif de
conflits de nature multiples:
- incapable de maitriser la coordination. Sans doute ne
se sont-ils pas rendu compte que malgré eux, les anciens,
habitués grâce aux mouvements anti-CPE, à parler
en public et à s'affirmer, ont bouleversé tout
espoirs, pour les jeunes acteurs de prendre en main cette
coordination. Cependant, ils ne sont pas les seuls responsables,
loin de là. La situation du
combat contre la LRU toute
entière était marquée d'un autre conflit d'une
ampleur démesurée, lequel ne pouvait manqué
d'affecté la coordination de manière intense.
- Ce conflit, c'est celui entre l'opinion publique,
orchestrée par les médias, et le mouvement étudiant.
Celui ci souffrant d'un discrédit très prononcé,
l'agitation du mouvement anti-CPE ne pouvait que difficilement se
répéter. Ainsi, la coordination ne bénéficiait
pas d'un soutiens exemplaire de la part des étudiants qui ne
croyant pas à la victoire, se sont rapidement découragés.
La coordination, consciente depuis le début que ce
découragement massif allait entrainer le mouvement à
sa perte, et ayant déjà fournis beaucoup d'efforts
pour initier ce mouvement, était prise en étaux entre
le manque de motivation général, et son intense
volonté de se battre contre la LRU. Ainsi, ce conflit entre
l'opinion public est le mouvement joua le rôle de catalyseur
de l'ensemble des conflits internes à la coordination.
- Enfin, reste le conflit le plus évident, le plus
classique, le plus difficile à dépasser depuis
toujours, celui des divergences politiques:
Malgré le fait que la coordination se soit passée
des syndicats et des partis dans son organisation, pour,
formellement, préserver son indépendance, l'influence
des décisions de ces derniers sur le fonctionnement de la
coordination était nécessairement presque intact, pour
la simple et bonne raison que les acteurs eux-même était
issues de tendance politiques diverses. Le fait qu'il y ait des
divergence politique est normal, ça n'est pas un problème
en soit, mais c'est une source de conflit:
Les clivages
engendrés par ce conflit sont diverses. Ils se manifestent
notamment par un petit évènement significatif, ayant
sévèrement marqué les relations au sein de la
coordination. Il s'agit d'un soir où la commission action
(destinée à organiser les actions secrète pour
pimenter et multiplier l'impact de la mobilisation) souhaitait
établir un rapport de force avec les CRS, bloquant l'accès
à la cible tant désirée : le rectorat. Certains
nez rouges (commission de sérénité, destinée
à distancier les manifestants d'éventuels casseurs) se
sont empressés d'ordonner aux manifestants de s'éloigner
de l'affrontement. Ce pose alors le problème du rôle
directif des nez rouges, et du droit de la commission action à
prendre toute sorte d'initiative.
Tout d'abord, l
a
commission action a toujours tort. Quoiqu'il arrive, soit elle
frappe trop fort, soit elle ne frappe pas assez. Elle joue le rôle
de bouc émissaire. En effet, la coordination toute entière
lui fait savoir qu'elle l'encourage, qu'elle lui fait confiance, et
en même temps, qu'une lourde responsabilité pèse
sur elle. Elle doit satisfaire tout le monde. Elle n'a pas le choix.
Or ce n'est pas possible, elle doit donc tout endosser. Quant à
la commission nez rouge, être nez rouge, c'est avoir un signe
distinctif, ce qui a pour effet immédiat que les manifestants,
comme la police, considère ces nez rouges comme étant
les leaders du mouvement. Ainsi, pour maitriser le mouvement, la
police n'a qu'a faire pression sur les nez rouges, lesquels seront
inévitablement écoutés par les manifestants. Ca
ne rate jamais! Les nez rouges, ne saisissant pas réellement
en quoi consiste leur rôle, prennent automatiquement celui
qu'on veut leur attribuer pensant bien faire. Ainsi, ils prennent eux
même l'initiative d'orchestrer la manifestation, de lui dicter
sa conduite, allant jusqu'à ordonner aux manifestants de ne
pas marcher sur les trottoirs, car ils ne seront pas comptés
dans les statistiques de la police comme faisant parti du
rassemblement. Ce problème ne vient pas des nez rouges en eux
même, qui ne sont que des manifestants comme les autres sur
lesquels viennent se poser des responsabilités auxquelles ils
ne sont pas préparés, mais d'un déficit
d'organisation de la coordination toute entière, car la
coordination ne saisit pas elle même le rôle qu'elle
prétend s'attribuer. J'y reviendrais.
Là encore,
le conflit entre les étudiants et les médias joue
un rôle important. Pas seulement en tant que catalyseur, mais
en tant qu'il est perçu comme une impasse. En effet, pour la
majeure parti des étudiants, le crédit qu'accordent les
médias à la mobilisation est crucial. Ils n'ont pas
complètement tort. Cependant, certains considèrent que
le mouvement, pour être un mouvement consistant, ne doit se
voir dicté aucun comportement par une instance suprême.
Le résultat serait un contrôle gagné par l'ordre
établi sur le mouvement. Or tout contrôle est réducteur
: les mouvements s'arrêtent lorsque les instances, partis
politiques, médias, syndicats, leur dictent de s'arrêter.
D'où, comme on dit, « les révolutions s'arrêtent
là où commencent les avancées sociales »...
Il ne va donc pas de soit qu'il faut attendre la faveur des médias
pour entreprendre quelque chose. La commission action, comme elle ne
fait jamais rien de bien pourrait même être perçu
comme une casseuse de mouvement, si l'on y prenait pas garde.
En
effet,
l'idée d'unité, telle que la considère
le sens commun, et volontairement ou non, véhiculée par
les médias, consiste en une uniformisation idéologique
parfaite de tout les individus d'un groupe (Ainsi on voit dans les
journaux : Mouvement récupéré par l'extrême
gauche, et autres absurdités). Bien entendu, ce n'est pas
possible, fort heureusement. Certains seraient tenté
d'affirmer que la violence c'est pas bien, et qu'il ne faut
jamais aller à l'affrontement, considérants que nous
sommes dans une démocratie. L'objet de mes propos n'est pas de
dire ce que doit être la démocratie, mais simplement de
souligner le fait que cette idée n'a rien d'évident en
soit. Tout le monde ne la considère pas de la même
manière. Par conséquent, certains, considérants
que nous ne sommes pas en démocratie, car ils s'en font une
idée bien différente, sont tenter d'affirmer qu'il est
nécessaire d'aller à l'affrontement. Je ne prendrais
pas parti, je ne suis moi même pas sûr qu'une réponse
soit plus valable que l'autre, car l'histoire étant faites
essentiellement de paradoxes, l'idée que l'on puisse adopter
une stratégie implacable, c'est à dire qu'il existe un
comportement morale bien structuré, bien précis pour
aborder une lutte, méritant l'unanimité me laisse
perplexe. Mais une chose est sûr, le simple fait de revendiquer
la convergence des luttes, d'accepter de se rassembler avec des
individus d'horizon politiques différentes, c'est accepter de
reconnaitre la légitimité de chacun des systèmes
de valeurs défendus par ces individus, dans la mesure où
ils se battent contre le même objet.
En théorie,
une coordination se doit de coordonner différents
individus sans leur imposer une quelconque ligne de conduite
contraire à leur idéologie, autour d'un ou plusieurs
élément(s) fédérateur. Ici : Le fait
d'être contre une loi. Elle est sensé n'être
qu'une interface permettant à différents groupes
d'établir des liens entre-eux, afin de construire une
cohérence dans la lutte menée. Même réduite
au simple milieu étudiant, on peut lui attribuer un rôle
de convergence des luttes. Elle se doit donc à tout prix
d'éviter de jouer un rôle directif, dans lequel un
groupe viendrait dominer tout les autres à ses fins.
Bien évidemment, dans un
soucis d 'efficacité,
tout le monde admettra qu'une partie vienne orchestrer l'ensemble des
éléments de la coordination, sans quoi aucune
organisation ne peut se construire. Où alors, il faudrait
prendre un temps trop conséquent pour dépasser tout ces
clivages. Or le temps est précieux dans un mouvement, donc on
préfère agir, même dans la soumission, que de
freiner le mouvement avec toutes ces questions. La coordination
manque donc à son rôle, car elle est victime du temps,
et représente du même coup un enjeu politique précieux
pour quelques étudiants qui peuvent alors en profiter pour
construire les fondements de leur carrière politique.
Déconcertés, presque tout le monde se voit obliger
d'accepter cette situation qui semble insurmontable.
Pourtant,
il suffirait d'abord, pour
dépasser tout ces conflits,
d'expliciter les rôles et les attitudes réciproques que
sont sensés avoir chacun des groupes au sein de la
coordination, et que chacun, ayant approuvé l'existence des
groupes avec lesquelles il coopère, soit moralement tenu d'en
accepter son activité. Il convient d'établir des
contrats sociaux entre chacun des groupes composant cette
coordination, du type « La coordination bénéficiant
des services de telle commission se doit de respecter en contre
partie ....(conditions nécessaires à l'élaboration
de relations saines pour éviter des conflits tels que ceux
cités plus haut) ».
Il faut aussi, pour éviter
les querelles du types anciens/jeunes, que la coordination
s'auto-garantisse de sa capacité à ne pas laisser plus
exister un individu qu'un autre dans les prises de paroles. Il faut
qu'elle expérimente ce qu'on appelle, la
non-directivité.Tout cela est loin d'être
impossible à mettre en place, mais nécessite une
organisation structurée bien en amont des mouvements de lutte.