11 juillet 2009
"Anarchiste" pour les anti-anarchiste,
"marxiste-léniniste" pour les anti-marxiste-léniniste,
... ou le Secours Rouge face à ses critiques
Historiquement
créé pour le soutien aux prisonniers des CCC, l’APAPC (Association des
Parents et amis des Prisonniers Communistes) s’est muée en Secours
Rouge pour étendre son soutien à d’autres militants attaqués par la
justice de classe pour leur engagement anti-fasciste,
anti-impérialiste, ou anticapitaliste, — et cela dans le cadre d’une
projet de construction d’un Secours Rouge International.
Le
Secours Rouge a ainsi soutenu les syndicalistes de Clabecq, les
militants révolutionnaires de Turquie et de Palestine, les dockers
réprimés pour leur lutte contre Bolkenstein, le communiste libanais
Georges Ibrahim Abdallah, les militants de Tarnac, le prisonnier
vert-anarchiste Marco Camenisch, les inculpés du 12 février 2007 en
Italie, et bien d’autres.
Le SR réunit des militants qui voient dans la justice de classe un
instrument au service de l’exploitation et de l’injustice, et qui ont
décidé de mettre de côté leurs divergences politiques et idéologiques
dans le cadre d’une lutte anti-répression fondée sur les principes
exposés dans la plate-forme du SR.
Le SR n’entend pas juger les moyens, les tactiques ou les stratégies
utilisés par les camarades qu’il soutient, dès le moment où il
reconnaît en eux des militants ayant lutté contre l’injustice et
l’exploitation et réprimés pour leur lutte.
De
la même manière, le SR n’entend pas juger les choix de ses membres dans
les combats qu’ils mènent en dehors ou parallèlement à leur engagement
dans le SR, tant que ces combats participent d’une démarche
anti-capitaliste, anti-fasciste, anti-impérialiste, anti-raciste,
anti-patriarcale.
Deux hypothèses extrêmes aideront à nous faire comprendre.
Le SR est une organisation révolutionnaire, cela signifie que nous
refusons de travailler avec des membres de l’appareil de domination, et
notamment des parlementaires, etc. Nous ne les invitons pas à nos
activités, nous ne leur donnons pas la parole, etc. Mais si un de ses
membres milite par ailleurs dans un parti ayant ou voulant avoir des
élus, cet engagement ne sera pas le problème du SR.
Le SR est une organisation légale, mais si un de ses membres s’engage
(en prenant soin de ne pas impliquer le SR) dans une organisation de
lutte armée révolutionnaire, le SR n’a pas à se prononcer sur cet
engagement.
Dans tous les cas, le SR ne demande à ses membres que de respecter,
dans le travail du SR, le cadre politique du SR défini dans sa
plate-forme. Le SR n’est pas un parti (ni la façade ou le satellite
d’un parti) qui demanderait des comptes à ses membres sur leurs autres
choix militants.
Le SR garde volontairement et ouvertement des caractères du mouvement
communiste dont il est issu (ainsi une analyse de classe, marxiste, de
la société) et auquel, dans cette mesure, il appartient, mais il n’est
pas au service d’une ligne politique particulière.
Le cadre d’action du Secours Rouge est très simple ; il est exposé dans
la plate-forme et porté par une pratique militante visible depuis des
années. Malgré cela, il se heurte encore trop souvent à
l’incompréhension, voire à la volonté de ne pas le comprendre.
Passons sur le PSL qui ne voit dans le SR que « les anciens CCC », passons sur le parquet fédéral qui voit dans le SR la couverture du « Parti Communiste Politico-Militaire »,
et penchons-nous quelques minutes sur deux documents récents attaquant
le SR, documents également pitoyables et remarquablement symétriques :
celui du journal Clarté et celui des anarchistes du journal Tout doit partir.
Le document du n°11 de Clarté, sobrement intitulé « Luttons
classe contre classe, contre la social-démocratie, contre le
démocratisme petit-bourgeois, contre l’idéologie anti-parti Pour
l’unité idéologique Vive le marxisme-léninisme », fait suite à la
scission survenue dans le Bloc ML précisément autour de la question du
SR. La volonté d’une (courte) majorité dans le Bloc ML de ne pas
respecter le cadre du SR, mais au contraire de l’instrumentaliser, de
l’utiliser comme satellite et caisse de résonance, s’est heurtée à une
résistance telle qu’elle a provoquée une scission dans le Bloc ML. Le
document anarchiste intitulé au secours,… des rouges, publié dans le n°4 de Tout doit partir est une réflexion sur la mobilisation anti-répression à partir de l’affaire de Tarnac.
Pour le Clarté, le SR suit une ligne anarchiste et anti-parti. Pour Tout doit partir le SR suit une ligne marxiste-léniniste, simple reproduction de la ligne ML du temps de Staline.
Juxtaposer ces délires permet de prendre la mesure de leur imbécillité.
La symétrie de ces deux documents atteint en effet une sorte de perfection.
La
base commune de ces deux textes est ce caractère sectaire qui se
conforte dans les conflits passés. Il est évident que si on mettait en
présence les rédacteurs de Clarté et ceux de Tout doit partir,
ils nous rejoueraient les fusillades inter-révolutionnaires d’Ukraine,
de Cronsdadt et d’Espagne, chacun accusant l’autre de « trahir la révolution » et de « faire le jeu de l’ennemi ». Nous connaissons ces discours. Les trois derniers paragraphes de la page 35 de Tout doit partir
en offrent un exemple particulièrement malhonnête et nauséeux
(communiste = fascisme), et certains d’entre nous ont gardé en mémoire
la manière pénible dont des militants du Bloc ML ont voulu évangéliser
les sans-partis du SR avec les vieilles antiennes sur
"l’hitléro-trotskysme". Et naturellement, toutes ces vieilles messes
stériles sont justifiées au nom de la «la mémoire historique » et « l’intégrité des principes révolutionnaires ».
Le
but du SR n’est certainement pas de réconcilier marxisme-léninisme et
anarchisme (ou trotskisme, etc.). Mais entre reconnaître les
différences profondes entre ces deux projets révolutionnaires, et
s’obstiner à ne voir dans l’autre que la copie conforme de ce qu’il
était dans les années ’30, il y a une marge que les imbéciles des deux
bords s’obstinent à escamoter.
Parce que ni les uns ni les autres
ne font une démarche critique du passé de leur courant (Staline ou
Makhno, à entendre les uns ou les autres, étant également sans peur ni
reproche), ils ne conçoivent pas que, de l’autre côté, il se trouve des
marxistes-léninistes et des anarchistes qui, dans le bilan des années
’30 des conflits entre anarchistes et communistes, ne pensent pas
seulement en terme de "victoire" ou de "défaite", mais pensent aussi en
terme de "gâchis".
Et si l’histoire ne se réécrit pas, si même les choses ne pouvaient se
passer autrement qu’elles se sont passées, rien ne nous oblige à
rejouer éternellement la même pièce.
Le
fait que le SR s’inscrive dans la tradition du SRI n’autorise en rien à
établir une égalité entre le SR des années ’30 et notre SR. Dans les
années ’30, il existait un véritable Parti Communiste, qui organisait
les secteurs avancés politisés et combatifs de la classe.
On peut
penser ce que l’on veut de ce Parti, mais ce qui est sûr, c’est que
rien de tel n’existe aujourd’hui. Il y a une multitude de groupes qui
s’imaginent bien en embryon du futur Parti, mais rien d’équivalent à ce
qu’était le PC des ’30. Clarté et Tout doit partir,
dans un ensemble parfait, veulent ignorer cela. Le Bloc ML veut ignorer
cela, qui prétendait (au nom de quelle réalité ?) établir avec le SR un
rapport semblable à celui du PCB avec le SR des années ’30. Les
anarchistes de Tout doit partir veulent ignorer cela, qui
trouvent que "rien n’a changé" entre notre SR et le SR des années’30. A
chaque fois le même déni de réalité, la même volonté de voir dans le SR
autre chose que ce qu’il est.
Ce qu’est le Secours
Rouge ? Le SR est la combinaison des principes de sa plate-forme, de
l’identité de ses membres, de la réalité de sa pratique collective.
C’est une organisation rigoureuse dans son projet et ses principes,
mouvante et évolutive dans sa réalité collective.
Nous
sommes une réalité. Cette réalité est le démenti vivant de leur
sectarisme obtus. Là s’explique leur hostilité. Non seulement nous
prétendons qu’il est possible de faire l’unité sur le front de la
solidarité sans sacrifier nos identités révolutionnaires, mais nous
faisons vivre pratiquement cette unité depuis des années. Et nous
continuerons à suivre cette voie, à apporter notre solidarité pleine et
entière aux camarades anarchistes, syndicalistes, trotskistes,
antifascistes, ML, maoïstes, autonomes et autres confrontés à la
répression de la bourgeoisie impérialiste, sans plus nous occuper de
ceux pour qui notre existence même fait scandale.
Bruxelles, le 10 juillet 2009.
Le Secours Rouge/APAPC, en cela compris des militant(e)s communistes,
des sympathisant(e)s anarchistes et communistes, des "sans-parti"
progressistes et solidaires.
http://www.secoursrouge.org/