Ah..les G.G ( Gontard/Gesson )
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A Rennes 2, le blues d'un président d'université face à la révolte
EDUCATION -
Depuis début février, le président de Rennes 2 Marc Gontard est
confronté à sa troisième révolte étudiante en trois ans et s'inquiète
des conséquences pour son université d'une grève qu'il juge désormais "incontrôlable".
"Etre président à Rennes 2, ce n'est pas une sinécure", confie dans un
soupir ce Breton de 63 ans, spécialiste de la littérature du 20ème
siècle. S'il avait su ce qui l'attendait avant son élection en décembre
2005, il reconnaît qu'il aurait sans doute refusé de diriger ce campus
de lettres et sciences humaines, en pointe dans toutes les
contestations."Mais une fois qu'on est dans le bateau, on va jusqu'au bout",
explique-t-il,
philosophe, dans son bureau au sixième étage d'un
bâtiment surveillé en permanence par deux vigiles. Début février, des
étudiants avaient cassé des vitres et la porte d'accès à la présidence
pour libérer un camarade surpris par des vigiles en train de taguer un
mur. Un autre bâtiment du campus a été transformé en squat
"par une trentaine d'autonomes, extérieurs à l'université, et les
étudiants les plus extrémistes de SUD et de la CNT" (Confédération nationale du travail). "Ils ont
apporté des canapés, installé un frigo et de quoi faire à manger, monté
des étagères, branché leur sono sur le réseau électrique",
explique-t-il. Ils ont aussi "forcé les portes des amphis pour les
transformer en dortoirs, forcé l'accès aux archives et depuis peu, ils
invitent tous les soirs un groupe de rap: c'est devenu un espace de non
droit".
"J'ai des craintes très fortes pour l'université. Nous allons subir
à nouveau une forte dégradation de notre image après le troisième
blocage du campus en trois ans", dit-il.
Rennes 2 a perdu 5.500 étudiants en quatre ans, ses effectifs
passant de 22.000 en 2005 à 16.500 en 2009. "Les parents ne veulent
plus inscrire leurs enfants dans une université où un semestre par an
est perturbé", analyse-t-il. Il s'inquiète aussi pour les 2.500
étudiants étrangers "qui paient cher pour étudier ici et n'ont pas
cours" et pour l'avenir des programmes d'échanges internationaux. "J'ai
eu récemment une université du Québec au téléphone. Je ne sais plus
quoi leur dire", soupire-t-il.
Marc
Gontard avait dû encaisser les reproches de parents d'étudiants et de
sa hiérarchie lors du mouvement anti-CPE du printemps 2006, quand
l'université avait subi huit semaines de blocage. Il s'était alors
opposé
publiquement au Contrat première embauche, mais après le retrait du
CPE, ses efforts pour rétablir l'ordre avaient été contrés par une
minorité d'étudiants jusqu'au boutistes. "Cela a été une leçon,
explique-t-il, on ne peut pas discuter avec ces gens-là".
Lors
du mouvement contre la loi sur l'autonomie des universités, à l'automne
2007, il adopte un profil dur, dénonce le recours à la violence et le
non respect de la démocratie par les bloqueurs qu'il traite de "Khmers
rouges". Il obtient la levée du blocage après deux semaines, mais les
étudiants les plus radicaux ne lui pardonneront pas. Depuis février,
"le mouvement étudiant mis en marche par le mouvement des
enseignants-chercheurs est devenu à Rennes 2 tout à fait incontrôlable", s'inquiète-t-il. "Cela n'a plus rien à voir avec les revendications
sur les décrets Pécresse. Les extrémistes ont pris le contrôle des AG
avec les méthodes habituelles de manipulations et d'intimidations, explique-t-il. Lundi, les étudiants ont voté la fin du capitalisme". "Dans toute ma carrière, je n'ai jamais vu une
telle accumulation de mouvements avec des blocages aussi longs et une
telle violence", confie-t-il.
Il dit comprendre pourtant "le mal être de la jeunesse" y voyant la
"nostalgie d'une société plus humaniste et un refus d'entrer dans un
monde de concurrence exacerbée".
Daniel ARONSSOHN (AFP)
Jeudi, après de longs débats et deux votes à main levée très serrés
lors d'une AG d'environ 2000 étudiants, le bureau a prononcé la
reconduite du blocage total de l'université jusqu'à lundi.