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 Lettre ouverte à ceux qui soutiennent les inculpés du 11/11

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2 participants
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black jack
Gloire a toi grand timonier!!!
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black jack


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Date d'inscription : 01/10/2007

Lettre ouverte à ceux qui soutiennent les inculpés du 11/11 Empty
MessageSujet: Lettre ouverte à ceux qui soutiennent les inculpés du 11/11   Lettre ouverte à ceux qui soutiennent les inculpés du 11/11 Icon_minitimeDim 11 Jan - 0:26

Lettre ouverte à tous ceux qui soutiennent les inculpés du 11 novembre
par Benjamin, l’un des emprisonnés de Tarnac.


http://www.soutien11novembre.org/spip.php ?article126

Citation :
jeudi 8 janvier 2009,

Salut à tous,

C’est
après trois semaines de décompression et un temps de réflexion, de
lecture intensive de tout ce qui s’est dit sur cette affaire pendant
que nous étions au trou, que j’entame l’écriture de cette lettre.

Je
suis sorti de Fresnes voilà un peu plus de trois semaines maintenant,
un peu déboussolé. Je ne m’attendais plus à être libéré aussi vite
devant ce qui semblait être un traquenard si bien orchestré. Retrouver
l’air du dehors et l’horizon du monde ont bien sûr été un grand
soulagement, on s’habitue si vite à voir son existence bornée par des
murs et des grilles, qu’il semble que ça fait des siècles quand bien
même ça ne fait au fond que 2 ou 3 semaines. Je remercie du fond du
cœur tous ceux qui se sont démenés pour nous sortir de là. Je suis sûr
que malgré tout l’arbitraire qui entoure les décisions de justice,
cette pression nourrie par les comités, les parents, amis et tous ceux
qui ont senti à raison que cette affaire les concernait au plus près a
eu un effet conséquent. J’aurais aimé pouvoir le faire d’une seule voix
avec mes camarades co-inculpés mais comme vous le savez il nous est
interdit de rentrer en contact d’une quelconque manière sous peine
notamment de retourner en prison.

Mais je suis hanté d’une
certitude : cette libération relève d’une « chance » inespérée, chance
qui remonte à loin, celle d’une part d’être né blanc, d’avoir eu
l’opportunité d’être diplômé, d’avoir des parents et des amis issus de
cercles « privilégiés » dont la mobilisation a sans nul doute plus de
chance d’être entendue que si j’étais né ailleurs et dans un autre
milieu.

Je suis hanté bien sûr par le fait que deux de mes amis
et camarades soient toujours incarcérés pour des motifs aussi
rocambolesques, mais aussi par la pensée que des centaines d’autres
personnes croisées notamment au cours de ma courte détention n’ont
jamais eu cette « chance » et pour cause. Les prisons françaises ont
englouti au cours des dernières années toute une frange de la jeunesse
de ce pays, cette frange jugée inassimilable, sans cesse harcelée,
toujours « déjà condamnée » et qui refuse toujours de rentrer dans les
rangs étouffoirs de cette société. Un fait saute aux yeux quand on
fréquente les cours de prison, une très claire majorité de détenus est
composée par des jeunes des quartiers populaires, dont certains ont été
abonnés aux séjours en prison. On remarque aussi le nombre effarant de
personnes détenues, pour des périodes souvent très longues, sous le
régime de la détention provisoire, régime dit « exceptionnel ». 6 mois,
9 mois, 1 an, 2 ans, 3 ans, sans procès et bien souvent sans preuve
tangible. C’est qu’il est sans doute plus compliqué d’avoir des
‘témoignages de moralité’, des garanties de représentation recevables
quant on vient de Villiers-le-Bel, Aubervilliers ou Bagneux, quand vos
parents sont considérés comme étrangers, qu’ils ne maîtrisent pas la
langue des magistrats et des media ou quand ils ne justifient pas d’une
activité professionnelle stable et surtout reconnue.

Pas de
misérabilisme toutefois, la solidarité se forge aussi derrière les murs
des prisons, la politique pénale de ce gouvernement est en train de
fabriquer une bombe à retardement. Plus on bourrera jusqu’à la gueule
les geôles de ce pays, plus des destins vont s’y croiser et dresser des
ponts entre tous ces milieux si savamment séparés à l’extérieur.

Le
rapprochement entre les traitements politiques, policiers et
médiatiques (cette triade tend à devenir une expression consacrée, peut
être faudrait-il penser à les fusionner officiellement !), de l’affaire
de Tarnac et celle de Villiers-Le-Bel l’année dernière est pertinente à
plus d’un titre…

Novembre 2005 (Clichy sous Bois), CPE, élection
présidentielle, Villiers-le-Bel, LRU, … deux parties de la jeunesse que
tout a priori oppose, nourrissent conjointement la paranoïa du pouvoir.

La
réponse ne se fait pas attendre et prend les même traits. D’un côté «
lutte contre le règne des bandes » pour justifier la répression dans
les quartiers après les émeutes, de l’autre, fabrication de toutes
pièces d’une « mouvance anarcho-autonome », de « groupuscules
d’ultra-gauche », comme repoussoirs à la révolte diffuse qui essaime au
fil des mouvements de la jeunesse étudiante ou « précaire ». Dans les
deux cas, une politique de communication de longue haleine pour
dessiner les contours de « l’ennemi intérieur », qui débouche
bruyamment sur des opérations coup de poing sur-médiatisées.
Démonstrations de force démesurées, curées médiatiques, embastillements
purs et simples. Faut-il le rappeler, outre les inculpés et incarcérés
multiples de novembre 2005, cinq personnes sont toujours incarcérées
après le coup de filet de Villiers-le-Bel et attendent un procès qui ne
vient pas, faute de preuves. Aujourd’hui c’est notre tour, mais la
chasse aux dits « anarcho-autonomes » est ouverte depuis plus d’un an,
six personnes au moins ont déjà été interpellées et entendues devant
les juridictions anti-terroristes depuis décembre 2007 pour des faits
ou des suspicions qui n’avaient jamais relevé d’un tel régime juridique
jusque là. L’étau se resserre et tous les coups semblent désormais
permis.

Il a déjà été développé largement dans les communiqués
des comités de soutien à quel point le recours aux outils de
l’anti-terrorisme représente un glissement significatif des procédés de
gouvernement et de la « gestion » de la contestation. Des scénarii déjà
vus dans plusieurs pays au cours des dernières années (USA,
Royaume-Uni, Allemagne, Italie…) débarquent avec fracas en France et
signent l’entrée dans un régime où l’exception devient la règle. Ces
procédures n’ont la plupart du temps rien à voir avec le « terrorisme »
et ce quelle que soit la définition qu’on en donne, elle répondent à la
logique millénaire de « en réprimer un pour en apeurer cent ». En
d’autres temps on en aurait pendu « quelques-uns » à l’entrée de la
ville, pour l’exemple.

Dans notre cas, il est très vite apparu
que « l’affaire des sabotages de la SNCF » n’était qu’un prétexte
opportun pour déployer au grand jour une opération de communication et
de « neutralisation préventive » prévue de longue date (depuis
l’arrivée de MAM au ministère de l’intérieur). La rapidité de la mise
en branle de « l’opération Taïga » et l’absence quasi totale d’éléments
matériels au dossier, même après les perquisitions et les
interrogatoires croisés, dévoile très vite à qui n’est pas occupé à
hurler avec les loups, la grossièreté du montage policier. Il aura
pourtant été fait de sévères efforts d’assaisonnement de cette histoire
un peu fadasse, un « groupuscule en rupture de ban et s’adonnant à la
clandestinité », un « chef incontesté », son « bras droit », ses «
lieutenants », des « relations amicales » ménagées dans le village par
« pure stratégie ». Mais rien n’y fait les gens croient définitivement
et heureusement plus « à ce qu’ils vivent qu’à ce qu’ils voient à la
télé ».

Une fois répondu pour chacun à la question de sa
participation ou non aux « actes de dégradation » sur les caténaires de
la SNCF, reste cet immense gloubi-boulga qu’est l’accusation de «
association de malfaiteurs en lien avec une entreprise terroriste ».
C’est d’ailleurs le seul chef d’accusation qui pèse sur la plupart des
inculpés dont moi-même.

Ce chef d’inculpation repose sur un
faisceau d’informations et d’hypothèses disparates, réunies par les
services de renseignement, mais que seule une prose policière pour le
moins imaginative permet d’articuler entre elles d’une manière aussi
unilatérale. Les liens d’amitié, politiques chacun à leur manière,
deviennent sans l’ombre d’un doute des affiliations organisationnelles
voire hiérarchiques. On fait d’une série de rencontres, de la
participation de quelques uns à des manifestations, de la présence de
certains autres relevée au cours des mouvements sociaux qui ont émaillé
les dernières années, les présages de la raison d’être strictement
‘politique’ (au sens le plus classique et plat du terme) d’un « groupe
» identifiable et isolable comme « cellule » (cancéreuse ?). Cela est
une contre vérité absolue et détermine un certain nombre de contre-sens
vis à vis de ce dont nous avons été diversement porteurs au fil des
années.

Le délit « d’association » permet d’englober d’un seul
coup l’entièreté de l’existence des personnes visées et tout peut y
devenir un élément à charge : lectures, langues parlées, savoir-faire,
relations à l’étranger, mobilité, absence de téléphone portable,
rupture avec son ‘plan de carrière’ où avec son extraction sociale, vie
amoureuse et j’en passe.

L’utilisation de ces outils «
antiterroristes » n’est finalement rien d’autre que l’indice de
l’agressivité propre à tout pouvoir qui se sait de toutes parts menacé.
Il ne s’agit pas tant de s’en indigner. Il s’agit en tout cas de ne
pas, ou plus, être dupe de cette opération de police politique. Elle
n’est que la tentative, des tenants du pouvoir, de communiquer au «
corps social » leur propre paranoïa, qui, elle, n’est peut être pas
totalement sans fondement.

On parle beaucoup autour de cette
affaire de l’essai intitulé « L’insurrection qui vient » et tout le
monde y va de son hypothèse pour dire QUI est derrière cette signature
qu’est le « comité invisible ». Cette question n’est intéressante que
d’un point de vue strictement policier. Le choix éditorial d’anonymat
qui a été fait doit être entendu, à mon avis, non comme une
particulière paranoïa des auteurs (même si elle se trouverait
aujourd’hui cent fois justifiée) mais par l’attachement à une parole
essentiellement collective. Non pas la parole d’un collectif d’auteurs
qu’on pourrait dénombrer, mais une parole qui s’est forgée dans les
aléas d’un mouvement où la pensée ne saurait plus être attribuée à tel
ou tel en tant qu’auteur.

Ce livre suscite beaucoup de
désaccords, voire de réprobation y compris parmi nous qui avons
pourtant fait l’effort de le lire et le comprendre. Il me semble que
c’est l’objet même de l’écriture politique : mettre ce qui demande a
être débattu sans délai au centre, le rendre incontournable, quitte à
être cru et sans nuance.

Tous ceux qui, par ailleurs, prétendent
savoir QUI est l’auteur de ce livre mentent purement et simplement ou
prennent leur hypothèse pour la réalité.

Les « lectures »
récentes de ce livre, notamment celle de la police et de quelques
criminologues de salon posent à beaucoup la question de la « radicalité
». Cette « radicalité » nous est renvoyée à nous comme trait
d’identité, voir comme chef d’inculpation qui ne dit pas son nom. Je ne
me sens pas particulièrement radical, au sens d’être prêt à accorder
les constats, les pensées et les actes (ce que plus personne ne fait
malheureusement et depuis longtemps). Par contre la situation est
radicale et l’est de plus en plus. Elle détermine des mouvements de
radicalisation diffus, qui ne doivent rien à quelque groupuscule que ce
soit. Chaque jour dans mon activité d’épicier notamment ou quand je
sers au bistrot, ou bien encore quand j’étais en prison, je discute,
j’écoute ce qui se dit, se pense, se ressent, et je me sens parfois
bien modéré face à la colère qui monte un peu partout. Ce gouvernement
a sans doute raison d’avoir peur que la situation sociale lui échappe,
mais nous ne servirons pas sa campagne de terreur préventive, car le
vent tourne déjà. Il vient de Méditerranée.

Il y aurait encore
beaucoup de choses à dire, de doutes à lever, de manipulations à
déjouer, mais tout ça ne fait que commencer. Ainsi ma position est en
phase avec celle des comités de soutien qui fleurissent un peu partout
: abandon des charges de « entreprise terroriste » et « d’association
de malfaiteurs », libération immédiate de Julien et Yldune et de tous
ceux et celles qui sont incarcérés à ce titre, pour commencer…

Viendra
le moment où on devra bien nous rendre des comptes pour le préjudice
énorme qu’on nous a fait subir, à nous, à Tarnac, mais aussi pour ce
qui n’est qu’une provocation supplémentaire à l’encontre de tout ce qui
ne se résigne pas au désastre en cours.
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http://www.scalp86.positifforum.com
Wesh
vieux de la vieille
Wesh


Nombre de messages : 432
Date d'inscription : 04/05/2008

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MessageSujet: Re: Lettre ouverte à ceux qui soutiennent les inculpés du 11/11   Lettre ouverte à ceux qui soutiennent les inculpés du 11/11 Icon_minitimeDim 11 Jan - 22:01

TRé BIEN !
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