Deux décisions rendues publiques, jeudi 5 juin, à Strasbourg par le conseil de l'Europe, dénoncent l'"insuffisance manifeste" de
l'offre de logements sociaux en France. Elles font suite à des
réclamations collectives présentées contre la France par le mouvement
international ATD Quart Monde et par la Fédération des associations
nationales de travail avec les sans-abri (Feantsa).
C'est la première fois que de tels constats de violation de la Charte des droits sociaux en matière de logement sont rendus par ce Comité. Il a jugé que la France
violait plusieurs dispositions de la charte, notamment celles
concernant les procédures d'expulsion et leur mise en œuvre, l'offre
insuffisante de logements à un coût accessible pour les plus pauvres,
les modalités d'attribution des logements sociaux, manquant "d'équité et de transparence", le faible nombre d'aires d'accueil pour les gens du voyage et la construction insuffisantes de logements sociaux.
MANQUE D'ÉQUITÉ DANS L'ACCÈS AU LOGEMENT
Autre carencedésignée par le comité européen : le manque de place en foyers pour sans-abri, auquel s'ajoute "l'insuffisance,
au niveau des municipalités, des capacités d'accueil de jour et
d'hébergement de nuit adaptées aux différentes situations".Pour le Comité, les mesures prévues en France pour augmenter le parc de logements sociaux vont dans le bon sens, "mais
même si toutes les mesures envisagées étaient menées à bien,
c'est-à-dire si 591 000 logements sociaux étaient réalisés d'ici à
2009, on observerait toujours un déséquilibre considérable par rapport
au nombre de demandes de logements sociaux".Le Comité a aussi stigmatisé "une discrimination dans l'accès au logement", estimant que la procédure d'attribution des logements sociaux locatifs "ne garantit pas suffisamment d'équité et de transparence, car le logement social n'est pas réservé aux plus pauvres".
EMMAÜS SE FÉLICITE, CHRISTINE BOUTIN RELATIVISE
ATD Quart Monde et la Feantsa se sont félicités de "cette décision phare du Conseil de l'Europe". Le mouvement Emmaüs a demandé jeudi au gouvernement de "tirer toutes les conséquences" de cette condamnation en mettant en place "d'une manière volontaire et déterminée, les actions correctives prévues".
De son côté, Christine Boutin, la ministre du logement, a tenu à
relativiser cette condamnation. Dans un communiqué, elle déclare : "Il porte sur la situation du logement en France au tout début 2006". Avant d'ajouter : "A
l'époque, je partageais l'indignation de la situation du logement en
France et j'ai mené moi aussi le combat pour que le droit au logement
devienne une réalité. J'ai obtenu la loi sur le Droit au logement
opposable (DALO) du 5 mars 2007 (...) et suis fière que la France soit
le premier pays européen à le faire."