black jack Gloire a toi grand timonier!!!
Nombre de messages : 1069 Localisation : vous etes ici! Date d'inscription : 01/10/2007
| Sujet: rapaces Sam 26 Sep - 20:10 | |
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- RAPACES : L’INTERVIEW
[b] RAPACES est le nom d'un groupe d'individus constitué en 1994, et dont le mode d'expression principal est le RAP. Les RAPACES visent à rendre au RAP sa fonction majeure : véhiculer le langage de l'Opprimé, de l'Exploité, sans vendre son cul aux maisons de disques, aux chaînes de télé, aux requins des radios pour en faire un spectacle.
Le Grain de sable : Tout d’abord, pouvez-vous vous présenter. Comment est né Rapaces ? Comment vous êtes-vous rencontrés ?
Rapaces : Rapaces est la résultante de deux groupes : la Fréquence aux Fulminantes Actions, groupe de rap créé en 1992 et la Fraction Armée du Mouvement Anarchiste Subversif, groupuscule politique informel (pour ne pas dire clandestin) né pendant la guerre du Golfe. A l’époque, certains d’entre nous étaient à la fois membres des deux organisations. Rapaces est donc l’aboutissement en 1994 d’un processus lent de fusion entre la F.F.A et la F.A.M.A.S. L’amitié (ce rapport humain naturellement ennemi de l’idéologie bourgeoise) est le ciment de notre construction. En 7 ans d’existence, Rapaces s’est numériquement agrandi, toujours sur la base de réseaux d’amis, pour compter aujourd’hui une trentaine d’individus.
Le Grain de sable : Pourquoi le nom " Rapaces " ?
Rapaces : Comme on l’explique via notre site Internet, " Rapaces " ne signifie rien. Néanmoins, on peut très facilement relever le jeu de mot bidon " Les AS du RAP ". D’aucuns y verront l’altitude, le vol plané de l’aigle en quête de proies ou le " Haut dessus des lois je bâtirai mon toit ", slogan cher aux rappeurs arrivistes et parvenus de Saint-Denis. En réalité, on s’est recouvert du manteau de l’Insignifiant, passe-partout nécessaire pour pénétrer le monde toxique du langage disloqué, banni, désintégré, détruit… marchand.
Le Grain de sable : Comme à l’accoutumée, la question rituelle : Que faites-vous pour vivre ? Comment vivre sans faire des concessions au système ?
Rapaces : Pour survivre on est contraint de travailler et/ou de voler sans se faire prendre. C’est tout. L’histoire de vivre sans faire de concessions au système, c’est de la connerie. Hormis les périodes pendant lesquelles les masses opprimées sont assez fortes pour prendre les rennes de l’Histoire, il est difficile pour des gens issus du prolétariat, comme nous, de vivre sans faire de concessions au système. D’où la nécessité de la Révolution. Par définition, les exploités participent négativement à l’édification du Capitalisme… Nous sommes des exploités, fils, petit-fils d’exploités. Quand toute la vie quotidienne est infectée par le cancer marchand, il est utopique de prétendre vivre sans faire de concessions à la domination. Ce qui caractérise le système spectaculaire-marchand c’est justement qu’il est le Capitalisme au stade du totalitarisme de la marchandise, c’est à dire qu’il occupe tous les aspects de la vie. La négation du système est l’attaque frontale, la lutte (qui s’opère forcément stratégiquement). La critique de la vie quotidienne lancée par les situs et toutes les pratiques subversives qu’elle implique est à repenser. Non pas que cette critique n’est plus fondée de nos jours, mais elle doit évoluer car le quotidien s’est modifié depuis les années soixante. Les provos, les fous, les voyous, les baiseurs… font plus vendre qu’ils ne font peur. On pense que le fait de jouer avec le rôle (confère " Traité de savoir vivre à l’usage des jeunes générations " de Raoul Vaneigem) est un point qu’on peut développer, notamment dans la grande optique du sabotage, pratique qui revient au goût du jour.
Le Grain de sable : Il est très rare de rencontrer des groupes de rap se référant aux situationnistes. Pourquoi cet attrait ?
Rapaces : Les situationnistes ont réussi à établir une analyse critique des nouvelles conditions d’exploitation depuis que la contre-révolution s’est généralisée à partir de la fin de la première guerre mondiale. Le travail réalisé par les situationnistes pour sauver la conscience de classe, quand il s’agissait (et il s’agit toujours) de l’anéantir définitivement, a été impressionnant d’intelligence et d’efficacité. Tentant de réconcilier les deux grands courants divisant le mouvement ouvrier, les situationnistes ont démontré irréversiblement que la Révolution prolétarienne doit en finir avec les idéologies afin qu’elle triomphe. Ils ont révélé le gigantisme de la tâche à accomplir : la révolution de la conscience.
Le Grain de sable : Etes-vous intéressés par la littérature ? Quels sont les auteurs qui vous enthousiasment ?
Rapaces : La littérature ne peut qu’intéresser, ne serait-ce que pour entrer en contact avec des périodes pré-spectaculaires. Donc on lit. Ca va de Céline à Castaneda en passant par Rabelais, Cervantes, Miller, Nietzsche, Baudelaire, Lacenaire, Camus, Wilde, Mesrine, Orwell, etc...
Le Grain de sable : Quels sont vos influences musicales ? Quels sont vos groupes favoris ?
Rapaces : Les réponses que l’on pourrait apporter à ce genre de questions seront toujours très réductrices. Nous sommes nombreux, et chacun a bien évidemment ses goûts propres. Néanmoins, on aura toujours une sensibilité pour les musiciens, poètes, artistes, qui apportent à leurs œuvres une dimension émancipatrice, que ce soit par les vibrations qu’ils génèrent comme par leur message en général.
Le Grain de sable : Dans quelles mesures vos origines sociales ont-elles influencé votre engagement ?
Rapaces : On est tous des prolos. Mais on provient pas tous des mêmes couches du prolétariat. Certains viennent de très bas (" l’Elite "), d’autres sont de l’Aristocratie prolétarienne. On est attaché à défendre la classe sociale, concept marxien qu’une tripotée d’enculés essayent de nier aujourd’hui, dans le monde libre de la marchandise arrogante.
On fait partie de ces populations hypocritement et cyniquement appelées " quartiers " et visées par la Politique de la Ville. Au jour d’aujourd’hui, on demeure dans le 93 et le 77 (Neuilly-sur-Marne, le Raincy, Montreuil, Torcy, Lognes…). C’est quelque chose que nous ne mettons pas en avant. Parce qu’on part d’une idée simple, c’est qu’on est tous les mêmes. Nous vivons tous la même vie, quel que soit notre quartier. Et on ne tire aucune fierté particulière à revendiquer les numéros de nos départements. Ca, c’est encore une connerie à laquelle on n’adhère pas. Bon nombre de nos familles ont vu naître des communards, des insoumis, des FTP, des anarchistes, des communistes, des lumumbistes et autres réfugiés politiques africains, asiatiques et sud-américains, des révolutionnaires, des enragés, des j’m’en foutistes… L’exploitation journalière, la putasserie hiérarchique du patron, du flic, du juge… la misère matérielle, psychologique et intellectuelle de la classe ouvrière, on connaît, même trop ! Pas besoin de bouquins pour avoir la main qui démange, ne demandant qu’à s‘écraser sur la gueule d’un con qui te donne des ordres parce que son contrat de travail a fait de lui un responsable rayon charcuterie ou un chef d’atelier. Pas besoin de littérature pour ressentir le désir instinctif d’exploser la tronche d’un connard qui mime son patron avec la BMW qu’il a été cherchée en Allemagne, pour laquelle il a économisé toute l’année sur ce qui lui restait de son salaire de manœuvre dans le paysagisme ou dans le bâtiment. Pas besoin de connaître la phénoménologie pour avoir envie de cracher à la face d’un chômeur qui ne sait que parler de foot, de shit, de religion, de " chiennes de meufs " à longueur de journée. Enfin tous ceux-là, on veut pas les tuer. Ca signifie juste que la passivité et l’acceptation de l’ordre et des valeurs bourgeoises est aussi notre oppresseur à travers tout un tas d’individus. Par contre, les bourgeois, financiers, membres influents des conseils d’administration des grandes banques, des multinationales, ceux-là et leurs chiens de flics et de militaires, on leur prépare des lendemains des plus atroces.
Le Grain de sable : Avez-vous été militants d’un mouvement politique ? Sinon de quel mouvement vous sentez-vous le plus proches ?
RAPACES : Parmi les nôtres, certains ont été adhérents de l’Union Régionale d’Ile de France de la Confédération Nationale du Travail (de la rue des Vignoles). Ils sont restés plusieurs mois pour vérifier notamment ce qu’ils pensaient de cette organisation avant d’en être membres. Ils ont découvert qu’il existe bel et bien des chefs informels à la CNT… que des décisions importantes ne sont pas prises en assemblées souveraines, que les chefs de la CNT font partie de réseaux discrets qui dictent à cette organisation ses positions… que ces chefs sont membres d’autres organisations ou très proches (Alternative Libertaire, LO, LCR, Ligue des droits de l’Homme, AC !, ATTAC, DAL, Grand Orient de France, Parti Socialiste, et oui le Parti socialiste, ce n’est pas une erreur !)… qu’ils sont finalement les exécutants de types haut-placés pour qui ils travaillent dans la vie professionnelle (Société de Conseil de Julien Dray)… qu’il y a des patrons (imprimerie) adhérents à cette prétendue organisation anarcho-syndicaliste et syndicaliste révolutionnaire (Syndicat de la Communication Région parisienne). Donc ça pue vraiment même si on y trouve des gens très sincères qui tentent de lutter vraiment contre l’exploitation. Comme Lutte Ouvrière, la Ligue Communiste Révolutionnaire, les ONG citoyennes, la CNT est, de fait, un satellite des partis politiques de la " Gauche plurielle ". La CNT, tu la trouves toujours en fin de cortèges aux manifestations organisées par le PS et le PC : c’est du " suivisme " pour éviter la construction d’une véritable force révolutionnaire. On occupe les gens quoi ! L.O et la L.C.R ont lancé une campagne contre le coalition gouvernementale aux élections européennes. Une fois élus, les représentants de ces deux partis ont intégré le groupe de la gauche plurielle au Parlement Européen. La L.C.R a soutenu la gauche au second tour des élections municipales de 2001. Tout ça, c’est pas de l’anti-Capitalisme, c’est de l’anti-Libéralisme afin de soutenir subrepticement la tendance croissante de la Finance internationale qui réclame plus de régulation du système financier pour prolonger encore de quelques années son existence. Ca ne veut pas dire que ces gens soient contre la déréglementation, l’effondrement du coût du Travail, bien au contraire. Tout cela est scandaleux, fourbe, vil, pernicieux et empreint d’une extrême manipulation (ça nous fait penser que le fondateur du groupe ATTAC à l’Assemblée Nationale vient d’approuver les frappes des Alliés en Afghanistan). Les seuls authentiques bolcheviks en France sont les militants de la Quatrième Internationale organisés au sein du Parti des Travailleurs. Le problème c’est qu’ils sont léninistes et qu’on n’est pas d’accord avec les visions de Lénine et de Trotsky (le Boucher de Kronstadt et des Makhnovistes). On est en contact avec tout un tas de mecs de mouvements se prétendant anarchistes et marxistes. On se sent proche de certains situs comme René RIESEL, dont l’action au sein de la Confédération Paysanne fut très intéressante. Ses analyses sur l’évolution de la société sont pertinentes. On pense, à l’instar de RIESEL, que le sabotage est à l’ordre du jour ainsi que l’organisation par petits groupes. Il faudrait même se recentrer sur les modes d’organisation tels que l’a connu la Résistance française durant la première partie de la Seconde Guerre mondiale. Se méfier de la technologie car elle renferme la Police. De toutes les façons, vue la manière dont la situation empire, il faut dès maintenant se préparer à la clandestinité.
Le Grain de sable : Au fond votre combat est un combat pour la révolution, non ?
Rapaces : Oui, pour la Révolution Prolétarienne Mondiale des Conseils Ouvriers.
Le Grain de sable : Vous avez démontré que les fachos infiltrent même le rap qu’ils dénoncent en général. Comment expliquez-vous cette dérive étonnante ?
Rapaces : Déjà, ça dénote une certaine décomposition d’un fascisme classique, puisqu’ils vont jusqu’à renier des positions qu’ils considèrent aujourd’hui comme des obstacles au but qu’ils se fixent. C’est une démarche idéologique, pseudo-tactique. Ils pensent qu’ils doivent convertir le Rap en une tribune à partir de laquelle ils vont pouvoir dégueuler toute leur merde patriotique, régionaliste et raciste. Dans le fond c’est vraiment ridicule et risible. D’abord parce qu’ils font du pognon ou essayent d’en faire tout en se revendiquant révolutionnaires. Ensuite parce qu’ils sont convaincus de rameuter les masses avec leur caca. Du point de vue de l’écriture, de la diction et du son, c’est vraiment à chier en plus, et on n’est pas les seuls à le dire, l’avis est quasi-unanime.
Le Grain de sable : Que pensez-vous de la scène rap actuelle ?
Rapaces : Pour reprendre une phrase de SHEEK, un rappeur de la première heure et membre du groupe les " NEC PLUS ULTRA " : " Le Hip-Hop qu’on voudrait nous vendre est mort et pue la merde. " A l’origine le rap est une expression artistique gratuite, ouverte, conviviale… tout le contraire des discours à 2 balles et onomatopées récités actuellement, et qui font les gros sous de l’industrie du disque. Aujourd’hui la scène rap est majoritairement un mouvement artificiel de propagande marchande, sexiste, religieuse et mafieuse visant à exacerber la décomposition sociale du prolétariat qu’engendre la guerre économique. Les pires ordures, les raclures d’arrivistes, les requins-graines d’exploiteurs sont à bonne école dans ce fumier gerbant qu’est réellement le " rap business ". Ce qui est très pervers c’est que ces types prétendent justifier leur place de pantins médiatiques par le fait qu’ils viennent d’en bas alors qu’ils sont les portes-voix d’une idéologie ultra-conservatrice… une idéologie que la classe dominante a besoin d’inculquer aux couches les plus pauvres de la population dans le but d’instaurer tranquillement le totalitarisme politique qu’elle nous mijote. SKYROCK EST PLUS DANGEREUX QUE RADIO COURTOISIE. Là où on leur nique la gueule, c’est qu’on les prend la main dans le sac, qu’on révèle leur nature profonde de falsificateurs. Car le rap, le Hip-Hop, c’est tout sauf ça.
Le Grain de sable : Vous n’êtes pas très tendres avec le rap en général. Quels sont vos rapports avec les autres groupes de rap ?
Rapaces : On se souvient quand on était môme des grands frères qui smurfaient, rappaient, pratiquaient le beat-box dans la rue, en bas de nos immeubles… Il ne reste plus rien de cette époque, les gens sont rentrés chez eux ou ne sont plus dans la rue pour les mêmes raisons : le business a tout pourri. On a des contacts avec des personnes qui continuent de défendre le rap non marchand, le vrai rap. La plupart des rappeurs sont aujourd’hui des paumés qui ont l’espoir d’être riches un jour grâce à la vulgarité qu’ils produisent. C’est pitoyable, y’a plus d’arrivistes au mètre carré dans ce milieu qu’à la Bourse ou à un meeting de Démocratie Libérale (D’ailleurs Madelin s’est payé des bons petits rappeurs bien noirs il y a quelques semaines, comme pour faire oublier qu’il cassait du bougnoule quand il était à Occident. Honte à ces prétendus rappeurs, vraies putes).
Le Grain de sable : Avez-vous fait beaucoup de concerts ?
Rapaces : Non. On n’a jamais fait de concerts, juste quelques agressions verbales et prestations publiques virulentes.
Le Grain de sable : Pour vous, la scène est-elle plus un moyen de promotion ou un plaisir à l’état brut ?
Rapaces : Rappelons que nous n’avons pas une démarche commerciale. La promotion n’est pas quelque chose qui fait partie de nos " compétences ". Nous ne visons aucune carrière ni même bénéfices à travers notre musique. La scène répond fondamentalement à un désir narcissique, à une représentativité, à une reconnaissance d’un inégalitarisme du droit à l’expression. La posture dominante d’un homme surélevé au dessus des autres, réquisitionnant la parole sans la partager, canalisant les pulsions en les laissant s’exprimer dans une salle de concert confinée plutôt que là où elle devrait l’être, c’est à dire dans la rue, tout ça, c’est quelque chose que nous remettons aussi en question.
Le Grain de sable : Quels sont vos projets (disques, concerts, etc…) ?
Rapaces : Un de nos objectifs est de bâtir un pôle solide du rap non marchand face aux enculés du business Hip-Hop en tout genre. Ca sera pas simple. En tout cas, on sait déjà que notre tâche ne se verra soutenue par personne d’autre que des hommes et des femmes conscients de l’emprise du fric sur toutes choses, et de l’imminence de s’en défaire.
Le Grain de sable : Merci d'avoir répondu si franchement à ces questions. Interview réalisé en octobre 2001 par Fabrice Trochet | |
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manou toto 1ere classe
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